Rencontre avec Benoît Grémare, réalisateur de « Kerloc’h, une enquête en Gwen Ha Du »

Kerloc’h : l’interview du réalisateur

Le week-end annuel du Cercle Holmésien de Paris, organisé les 27 et 28 janvier 2018, a été l’occasion de projeter en avant-première le court-métrage « Kerloc’h, une enquête en Gwen Ha Du » en présence de l’équipe du film. Pour en savoir plus sur le tournage de ce « Sherlock breton » et sur les subtilités du scénario, nous avons posé nos questions à Benoît GRÉMARE, réalisateur du projet.

NB : le film sera prochainement mis en ligne sur la chaîne YouTube des Éditions BenGrem.

Quelles ont été les principales sources d’inspiration de ce court-métrage ?

L’idée de réaliser un court-métrage sur le Cluedo me taraudait depuis plusieurs années. Or à la fête de Noël 2015 m’a été offert le livre du making-of de la série Sherlock, que j’appréciais particulièrement pour la subtilité et l’adaptation moderne qu’elle propose du célèbre détective. Au vu de ce qui était possible de réaliser à notre niveau, j’ai tenté de mixer ces deux références dans un huis-clos, en empruntant au style d’Agatha Christie afin de raconter une histoire originale basée sur une nouvelle méthode de déduction de crime.

Combien de temps a duré la réalisation de ce projet ? A-t-il été facile d’obtenir les autorisations de tournage dans les différents lieux où le film a été réalisé ?

Le tournage a été court. Il n’a fallu que 7 jours à notre équipe pour réaliser l’intégralité des scènes, ce court laps de temps étant lié au fait que nos autorisations de tournage ne couvraient que quelques heures, entre 18h00 et 23h00. Car pour renforcer l’ambiance du film, le directeur de la photographie Damien PUAUD a appuyé l’idée d’un tournage de nuit en raison des grandes baies vitrées présentes sur les lieux de tournage. Ceux-ci, prestigieux et alliant un style néogothique et XIXe siècle, ont chacun nécessité une autorisation spécifique, notamment auprès du Conseil Départemental du Finistère pour le Château de Trévarez, et pour la Préfecture du Morbihan à Vannes pour laquelle nous avons porté notre demande jusqu’au Ministère de l’Intérieur en soutenant l’originalité de ce projet et notre démarche culturelle de valorisation du patrimoine.

Puisque la structure de production est associative, toute l’équipe du film est donc constituée de bénévoles ?

Elémentaire ! Nous avons été 20 personnes sur ce projet, 12 techniciens et 8 acteurs, tous bénévole et portés par l’amour du cinéma et de Sherlock Holmes. Après un casting public effectué en octobre 2016, les acteurs ont été sélectionnés en fonction des rôles. Outre le fait d’avoir déjà pu tourner avec certains acteurs lors de projets précédents tels qu’Aubin LANDAIS (Kerloc’h), Gwenola DAVID (Nolwenn) et Baptiste MARCAGGI (Professeur Magenta), nous avons recruté de nouveaux profils pour cette aventure comme Manuela JOSSET (Madame Blanche), Didier ROMANETTO (amiral Marine) et Florent BODIOU (maître Lebrun). Certains sont déjà professionnels, d’autres en devenir, et tous coordonnés par le directeur des acteurs Pierre DEVANN sur ce projet. Nos techniciens proviennent également du milieu professionnel ou sont en émergence, très volontaires et exigeants, comme Maogan CONAN, Gurvan JACQUES et Stéphane MARTIN.

Que veut dire « Gwen Ha Du » dans le titre « Kerloc’h, une enquête en Gwen Ha Du » ?

En breton, « gwen ha du » signifie « blanc et noir ». Le sous-titre du film, « Une enquête en noir et blanc », est un hommage au premier roman d’Arthur Conan Doyle mettant en scène Sherlock Holmes, « Une étude en rouge ». C’est pour jouer avec cette idée que les scènes de reconstitution du crime ont été passées en colorimétrie noir et blanc.

Au sujet du scénario du film, pourquoi les personnages disent-ils à plusieurs reprises qu’ils ont payé pour être présents au manoir ? L’enquête n’est-elle qu’un simple jeu puisque l’on découvre finalement que le Dr Charbon n’est pas mort ?

Kerloc’h affirme à un moment qu’il est un consultant détective de haut niveau et son assistante Nolwenn révèle que les suspects ont payé pour cette prestation. Ce sont des clients ayant versé un acompte afin que Kerloc’h imagine le crime qu’ils auraient pu faire ensemble pour se débarrasser du Dr Charbon, leur ennemi commun. En vérité, Kerloc’h intervient pour planifier leur crime, en se basant sur les caractères et les personnalités de chacun à partir de leurs signes astrologiques. Mais Kerloc’h se croit un grand détective, il se ment à lui-même et s’en rend compte lorsque le Dr Charbon arrive (encore) vivant au château. Le crime va avoir lieu et on découvre ainsi que Nolwenn, qui gère cette prestation de service, est en réalité le maître du jeu employant l’intelligence de Kerloc’h pour obtenir des contrats de planification d’homicides.

Avant le twist final, Kerloc’h n’est donc pas conscient qu’il aide de futurs criminels à commettre un meurtre qui n’a pas encore eu lieu ?

Non, il est trop concentré dans son analyse, ses réflexions, sa logique et le rôle social qu’il se donne porté par son égo qui l’empêche d’avoir toute prise de recul sur les évènements. Pour lui, sa prestation n’est qu’un jeu de déduction, se réfugiant derrière une froide logique et se détournant de sa conscience pour ne pas percevoir les conséquences morales de ses conseils.

Pourquoi Kerloc’h se base-t-il sur les signes astrologiques pour faire avancer son enquête ?

Je cherchais une originalité pour l’histoire et au lieu de me contenter de calquer le personnage de Sherlock Holmes, j’ai intégré une méthode de déduction originale basée sur les signes astrologiques des suspects. Avec quelques traits de caractères, Kerloc’h devine le signe de la personne et complète son analyse en imaginant les interactions qu’entretiennent les différents signes entre eux dans la même pièce, le fameux huis-clos. Pour cela, j’ai lu plusieurs manuels d’astrologie sur les signes et les personnalités qui en découlent afin de relever les similitudes et orienter le scenario sur cet aspect.

Comment a été tournée la scène finale où la caméra fait un mouvement de travelling arrière pour s’envoler au-dessus du château ?

Cette scène finale, qui symbolise la prise de recul du personnage principal par rapport à ce qu’il s’est passé, a nécessité l’utilisation d’un drone piloté par Guillaume ROSELLO au Château de Trévarez. Au vu de nos moyens, seul un drone pouvait réussir ce recul de caméra, s’envolant d’un plan moyen à un plan d’ensemble en guise de conclusion, afin d’appuyer un final impactant renforcé par la musique du groupe 3 DIMENSIONS D’ILLUSION qui nous a accompagné dans la postproduction. Actuellement, nous préparons le sous-titrage anglais de Kerloc’h afin de le faire découvrir au plus grand nombre via les festivals de court-métrage, en espérant que les fans de Sherlock Holmes à travers le monde apprécient l’hommage que nous souhaitions lui rendre.

Interview réalisée par Xavier BARGUE

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